jeudi 1 septembre 2011

Dans la gazette

Je suis un peu gênée, là, mais quand même, je ne résiste pas à vous parler de ceci.

J’ai une pensée pleine de compassion pour les vedettes, les célébrités, les personnes publiques ou bien les monsieur et madame tout-le-monde qui se retrouvent dans journal parce que leur maison a été inondée, parce que leur chien vit mal le passage à l’heure d’été ou parce qu’ils ont couru un 10 km à travers champs avec une poignée d’autres coureurs. Vous penserez que je suis naïve ou idéaliste, c’est pareil me direz-vous, mais jusque là je croyais que les personnes interviewées par les journalistes étaient vraiment interviewées par les journalistes.

Quand, dans le journal, je lis le témoignage de Mme Mertens qui raconte qu’« il a commencé à pleuvoir vers 17 h 30. À 21 heures, l’eau a pénétré dans la cuisine et puis dans la salle-à-manger. Les meubles en chêne de mon mariage, je pourrai les récupérer mais, mon mobilier en contreplaqué, il est bon pour la poubelle. C’est la troisième fois que ça arrive en cinq ans et les assurances ne veulent pas intervenir, qu’est-ce qu’on va faire monsieur, déménager ? à notre âge ? Ça fait cinquante ans qu’on vit dans cette maison, à notre âge quand on déménage c’est pour le cimetière ! » Et bien, quand je lis ça, elle me fait de la peine Mme Mertens avec ses pieds de meubles tout mouillés, pauvre madame, et j’espère que le journaliste lui a fait un gros câlin pour la consoler un petit peu. Maintenant, je doute. Mme Mertens pourra-t-elle sauver ses meubles en chêne ? Tient-elle à mort à rester dans sa maison ? 

Même chose pour l’entourage de DSK et d’Anne Sinclair ­­– pour évoquer une actualité amusante – qui se fend de déclarations rassurantes sur l’amour du couple et sa sérénité à toute épreuve. Qui, dans la presse, remplit tout cet espace entre les guillemets dudit entourage ? Avant, j’aurais pensé à un voisin, au chauffeur, à un collaborateur, à un ami du couple, au jardinier, au prof de yoga de Mme Sinclair. Maintenant, je me demande si ce n’est pas un verbiage de synthèse. Pas que ce soit nécessairement faux, mais plus écrit que retranscrit. Quel crédit y apporter dès lors ?

L’entourage, bien sûr, il s’en fiche. La formule est anonyme et nul ne pensera en « se » lisant : mais je n’ai jamais dit ça! Par contre, Mme Mertens*, elle ne se souviendra peut-être pas d’avoir parlé avec un journaliste. Et puis d’abord, ça fait seulement trente-cinq ans qu’elle vit là. Qu’est-ce qu’ils vont penser les voisins, qu’elle est sénile et ne sait plus compter ? Et puis, ses meubles, c’est pas du chêne mais du merisier, rien à voir le chêne et le merisier. J’ai eu la même surprise en me lisant dans le journal (en ligne ici). 

La Nouvelle Gazette, édition louviéroise, mercredi 3 août 2011
Oui, j’ai bien parlé avec des gens après la course, mais avec personne qui se soit présenté comme journaliste. Non, je ne reviens pas plusieurs fois par an en Belgique. Non, je ne cours pas le marathon de Montréal comme je vais au supermarché. Ça fait vraiment bizarre de se voir tenir dans le journal des propos qu’on n’a pas tenus. Imaginez comme ça doit être déplaisant pour les gens d’importance dont les propos sont importants de découvrir à longueur de colonnes des phrases et des interviews imaginaires bourrées d’approximations.

Notez que dans un autre billet je me plaignais féministement du peu d’attention porté aux résultats des femmes dans la presse. Quand les premières arrivent, beaucoup d’hommes sont déjà arrivés, elles passent le plus souvent inaperçues. D’ailleurs, dans les grands marathons, les élites féminines partent une demi-heure avant les hommes, les vedettes ne sont ainsi pas volées. Ici, il aura fallu un peu d’exotisme, pour susciter la surprise et remporter le titre (de l’article). 

Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire !

* Mme Mertens est une personne inventée. Pensez-vous que je ferais une bonne journaliste ?

Jogging des Éoliennes, Estinnes-au-Val, Belgique, 30 juillet 2011

3 commentaires:

  1. Tu peux te lancer en politique car tu fais maintenant partie des clubs des mal-cités. Selon l'article, tu seras en pleine forme pour Montréal.

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  2. UNe chose que je peut te dire DElphine ,: en plus d'avoir ce talent fou pour la course ,tu as un excellent talent littéraire c'est certains..! Te lire c'est du bonbon..! PIerre .M Dailymiler's

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  3. Hihi, Luc, si j'étais en politique, je te confirmerais que je suis effectivement au top pour Montréal. Mais comme je ne suis pas en politique, je dois avouer que je ne fais pas Montréal. par contre, il y a le demi de Granby qui arrive.

    Pierre, tu exagères mais c'est adorable. Merci!

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